J'ai toujours trop chaud pour écrire de longs billets, mais ma mémoire est intacte ou presque et c'est parce que j'en suis bientôt à ce demi-siècle que je m'accorde le droit de régresser et de me souvenir des meilleurs goûters de mon enfance.
J'ai eu la chance vous le savez, d'avoir une grand-mère exceptionnelle qui cuisinait beaucoup. Avec trois fois rien, parce qu'elle était pauvre et d'un pays âpre, elle faisait des merveilles. Elle ne jetait rien, elle transformait.
Je lui dois l'éducation des papilles, un certain goût pour l'authentique saveur et je répète comme elle le faisait, qu'un bon produit n'a pas besoin d'artifices.
Mes goûters de petite fille furent des instants magiques où la cuisine et les odeurs qui s'échappaient des marmites créaient un monde à part, chaud, ouaté, enveloppant et largement mystérieux.
Ma grand-mère adorée qui ne savait pas les mots de l'amour mais qui les disposaient dans les assiettes et ne me quittait du regard que lorsque je repoussais ma chaise, repue, heureuse comme une petite fille aimée.
Le plus extraordinaire d'entre tous fut incontestablement la tartine de pain beurrée sur laquelle elle râpait du chocolat noir qui tombait en délicieux copeaux.A cette époque, point de baguette mais une bonne grosse tranche de pain de campagne un peu rassis qu'elle passait quelques secondes au four pour mieux étaler le beurre. (tous les détails ont leur importance)
Le flan à la vanille, emporté de haute lutte, car il me fallait la tarabuster une bonne semaine à l'avance pour ce dessert divin.
Mais quand je la voyais le matin, sortir son moule à oreilles et la gousse de vanille de son globe de verre, je savais que le flan serait sur la table un peu plus tard.
Le dessert d'automne était la tarte sucrée au potiron accompagnée de sa petite crème aigrelette (fraîchement aigrelette mais pas surie, où est la nuance ?). J'aimais le potiron sous toutes ses formes mais la tarte sucrée à l'écorce caramélisée était une petite bénédiction.
Le dessert de l'enfant sage, à la mode de Proust, toujours faites maison avec des zestes d'orange ou de citron. Servies par deux et sur demande répétée, le droit à un nouveau passage.
Le dessert du dimanche, avec le chocolat fondu au bain marie, touillé (par mes soins attentifs) à la cuillère en bois (léchée en douce) et la délicate opération du torchon. (sacrifié à cet exclusif usage).
Et les deux tartes des vacances dans les Vosges avec elle.
La tarte aux "brimbelles" qui bleuissent si joliment les dents.
Et celle aux mirabelles entières pour ne pas risquer d'y trouver un petit ver en les fendant en deux "et alors" disait-elle "si tu en trouves un, tu le manges, ça te fera de la viande !". Mais par amour pour moi, elle ne les ouvrit plus jamais en ma présence.
Et enfin, la boîte de bergamotes de Nancy achetée chaque année chez un confiseur, à côté de la Place Stanislas, mon cadeau.
Les bergamotes et leur parfum inoubliable.
dimanche 16 août 2009
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9 commentaires:
Que de souvenirs !
J'ai le même pour la baguette beurrée et chocolatée. :D
Et pour ce qui est des autres douceurs, je pense aux gâteaux Chamonix aussi.
Mais ce qu'elle faisait le mieux à cette époque était tout ce qui était salé. Et ça tombe bien car j'aime davantage le salé. Ou bien est-ce parce que j'ai été habituée au salé que je le préfère.
C'est comme l'histoire de la poule cette affaire ! :D
T'as grand-mère était Lorraine?? parce que la majorité de ces petites douceurs viennent de ma belle région :)
Quels magnifiques souvenirs que ces douceurs d'enfance! As-tu fait toi-même tous ces gâteaux? Pour moi aussi la tartine au chocolat à 4 heures, qui attirait tant les guêpes et les abeilles,l'été, sur la plage! Maintenant où sont-elles? Avec les papillons sans doute! Envolés eux aussi! C'est un très joli texte que j'ai pris grand plaisir à lire!
Fleur, ma grand-mère était vosgienne, des Granges de Plombières très précisément.Née en 1885 dans une famille si pauvre qu'elle ne put aller à l'école très longtemps et s'engagea dans la vallée comme cuisinière dans les hôtels.
Une grand-mère merveilleuse bien que bourrue. Elle était une taiseuse,je suisune causeuse, j'ai meublé tous ses silences avec mes histoires, elle m'a toujours écoutée avec bienveillance. Elle ne savait pas parler d'amour, elle le donnait. Très en avance sur son époque, féministe sans le revendiquer, elle voulait que chaque femme puisse vivre de son travail sans rien devoir à un homme.
elle n'était pas que cela non plus, elle était une grand-mère comme j'en souhaite à toutes les petites filles qui rêvent de grandir.
Oui, Mango, àpart pour la tartine,j'ai participé à tous les goûters, cassé pas mal de gâteaux roulés, pétri les pâtes à tarte"l secret, c'est de ne pas trop pétrir" disait-elle, sinon ta pâte sera dure, j'ai mis mon doigt dans les pots de crème, laissé les traces de mon index sur le flan à peine sorti du four, fait des trous dans les gâteaux, bref, tu vois, j'ai participé du début jusqu'à la fin.
Oh plein de choses qui me rappelle aussi mon enfante :)
Hummmmmmmm ces sortes de gâteaux et tartes que je ne connais pas.
Chez-nous c'était la tarte au sirop d'érable, tarte au sucre, îles flottantes, etc.etc.
Des souvenirs...
Pour moi, l'alimentation reflète notre vie intérieure. La bouffe peut-être fade, épicée, sucrée, salée, variée, exotique, surprenante... Bref, plein de qualificatifs qui peuvent s'appliquer à notre vie en générale.
C'est pour cela que j'aime faire à manger et mettre mes propres ingrédients. C'est certainement pour cela que je prends plaisir à goûter une vraie tomate, à la savourer, plutôt que de m'empiffrer de tomates sous vides déjà préparées ou de plats tout faits. L'alimentation est le reflet de notre conception de notre existence ; en grande partie.
Un bien beau billet que tu viens d'écrire et qui me fait saliver !
;o)
J'avais loupé ça ! Mes joues piquent d'envie et d'émotions en parcourant tes lignes.
Ca fait du bien Partour...
Bises tendres.
Rose
PartouT...
Rose
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