mardi 22 juillet 2008

Histoires de chiens (Part one)


Mon Bingo,
Je t'appelle "Gros namour" ou "Grelele", tu réponds aussi aux surnoms.
Un jour, nous sommes allés Clément et moi au Refuge du Petit Pigeolet à l'Isle sur la Sorgue, nous avions un chagrin incommensurable et nous ne pouvions y faire face, Ninette, la petite Scottish tant aimée était morte. Ce point final nous arrachait les tripes.
C'est Clément qui t'a vu le premier, pour tout t'avouer, je parlais à un certain Nobel, chien roturier et diversement croisé, Nobel me plaisait, il était très foutraque, tant dans le poil que dans l'allure. Nobel n'était pas adoptable, trop fugueur et trop mangeur de poules, de plus, il avait la passion du saut dans le vide et mes étages ne l'auraient pas rebuté.
Clément m'a dit d'aller te voir, alors je t'ai vu. Tu étais si grand, si costaud, je ne m'imaginais pas te recevoir dans mon appartement, je te voyais courir dans des grands espaces verts et toi, tu me regardais et si je déplaçais mon regard, tu virais vers moi pour me récupérer.
J'étais déjà très conquise tu sais, mais je me sermonnais.
Clément l'était bien davantage, il avait entrepris une grande conversation où il était question d'aménagement du territoire, il te concédait une place dans le grand foutoir de sa chambre et te promettais que tu y serais roi.
Et puis, la dame est arrivée. Elle m'a conté ton histoire, tes pattes brisées, l'abandon, la torture, ce qu'on t'avait fait, mais elle ne le faisait pas dans l'espoir de te mieux placer, elle faisait son boulot de dame aimante. Elle m'a dit que tu étais gentil, ça, je le savais déjà. Elle m'a dit que tu étais calme et que l'appartement ne te déplairait pas, ce qu'il te fallait, c'était de l'amour.
De l'amour ?
Je t'aimais déjà.
Elle m'a dit qu'il faudrait du temps et de la patience, mais que tu étais un bon chien et que tu comprendrais vite.
Elle m'en a dit tu sais, des choses sur toi, je ne l'écoutais déjà plus je savais que je repartirais avec toi, j'ai juste demandé comment tu t'appelais, et je suis allée remplir les papiers d'adoption.
Le retour, a été épique, tu ne t'en souviens certainement pas.
Tu ne voulais pas monter dans la voiture, trop évocatrice de ce que tu avais souffert, tu avais été jeté de la voiture avant qu'on ne te brise les pattes.
Clément et moi avons parlementé pendant une bonne vingtaine de minutes et comme tu ne cédais pas, il a bien fallu te "pousser au cul". Tu as tremblé durant tout le trajet et Clément, assis à l'arrière avec toi, te caressait, tâchait de te rassurer pendant que je parlais pour que tu t'habitues au son de nos voix.
A l'arrivée, tu n'as pas voulu descendre de cette même voiture et nous avons du réinventer un autre scénario pour encore une vingtaine de minutes.
Les escaliers t'ont laissé perplexe, tu ne savais pas grimper autant de marches, mais à la négociation, nous commencions à être brillants et nous avons atteint l'Olympe ensemble.
En fait d'Olympe, il s'agissait d'un 3 pièces cuisine, nous t'avons fait faire le tour et je me souviens très bien que tu as arrosé mon ficus lyre qui ne s'est jamais remis de l'affront, il faut dire que tu l'as tué à petits feux trois semaines durant en compissant régulièrement.
Mais en dehors de ce marquage, tu étais propre et presque bien élevé, sauf que tu ne parlais guère.
Tu nous a mis en observation trois semaines, sans un mot, sans un regard, tu ne nous snobais même pas, nous étions transparents, du moins, l'avons-nous cru.
Tu acceptais nos caresses mais tu n'y répondais pas. La seule chose que tu ne supportais pas, c'était une porte fermée, nous avons appris à vivre toutes portes ouvertes.
Tu boudais tes gamelles en notre présence, mais tu mangeais la nuit, puisque la pitance disparaissait.
Nous nous sommes mis à ton diapason et nous nous sommes apprivoisés mutuellement avec, je crois, beaucoup de respect pour ce que tu avais vécu d'infâme et comme nous l'avait conseillé la dame, infiniment de patience.
Et puis un matin, alors que je déjeunais dans ma cuisine, tu es venu et tu as posé ta tête sur ma cuisse, comme ça, l'air de rien, j'en aurais pleuré.
Jour après jour, tu nous a manifesté de plus en plus de signes, tu venais nous voir, tu restais avec nous dans la pièce, tu te mettais sur le dos et nous te grattouillions le ventre et tu t'es aussi mis à parler.
Tu avais, tu as toujours, une belle voix de baryton. C'est à Clément que tu parles le mieux,il se colle contre ta babine lorsque tu es couché et tu lui modules de jolis sons, c'est parfois si drôle.

Mon Bingo, mon gros namour, mon chien adoré.
La voiture est désormais une de tes grandes copines, tu y laisses ton odeur et tes poils. Mes sièges sont douteux, c'est "la voiture des chiens". Tu aboies démesurément à n'importe quoi, lorsque tu y es installé, je t'engueule, tu t'en fous et moi aussi du reste.
Nous partons nous promener, j'aime te voir courir. Nous jouons au bâton que tu ne ramènes jamais, tu te roules dans les puanteurs et je t'engueule encore, tu continues de t'en foutre et moi aussi !
Ta tête est sur ma cuisse tous les matins que nous partageons, et tu petit déjeunes avec moi, tu apprécies la tartine beurrée et tu m'engueules si elle tarde à venir, je m'en fous, toi aussi, je crois.
Tu es mon chien merveilleux, mon héros au sourire si doux, au regard si bienveillant, parfois, pourtant, j'y vois comme une petite ombre passer, alors je te parle, tu m'écoutes et tu glisses ta truffe dans ma main. C'est toujours ce que tu fais lorsqu'il est l'heure de notre rendez-vous.
Tu vieillis mon Bingo, mon gros namour, je le vois bien, je le sais bien, j'essaie de ne pas passer à côté.
Tu es là, à côté de moi, pendant que j'écris ces mots sur toi, juste des mots pour qu'on sache que la place que tu occupes est immense, tu me regardes, je te souris, nous avons encore de beaux moments à vivre ensemble, je ne veux pas passer à côté.
Tu es mon Bingo, mon chien merveilleux et je t'aime.




A suivre...

4 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est magnifique.

(Je n'arrive pas à taper autre chose, tant ce que tu as écrit m'émeut.)

Diane a dit…

L'amitié de l'homme et la bête m'émeut toujours autant a chaque fois, chaque fois, j'en parlais justement ce matin a propos de Jaco et de tifille; chatte très sauvage mais qui aime Jaco...
Bingo je l'adore depuis longtemps je le trouve si beau et tout souriant en laisse avec toi, son beau regard de la première photo aussi. Bingo est aussi ta famille, ton petit, ton ami.

calypso a dit…

Un message magnifique que je découvre à l'instant...

leschatsdumaquis a dit…

Et moi je pleure en priant pour que personne ne rentre dans mon bureau à l'instant même...

Bingo, je t'aime aussi.

Sois heureux où que tu te trouves ; tu mérites tous les bonheurs réunis

Rose