lundi 23 juin 2008

Selon Billie


J'aimerais bien écrire quelques lignes très gaies, très primesautières, très volatiles, sur des choses gaies, primesautières et volatiles. Elles s'évaporeraient très vite dans l'atmosphère sans laisser aucune trace et cela s'appellerait légèreté.

Aujourd'hui, je pense à Billie, mais derrière elle, il y a toute une histoire. Je ne sais pas comment vous faites vous, mais en ce qui me concerne, tout ce qui laisse une trace chez moi est évidemment associé à un souvenir. Je ne garde que les puissants les très bons et parfumés, j'enfouis les autres sous des monceaux de petites dentelles délicates, ainsi, quand l'envie me vient de les explorer, le temps leur a dessiné des arabesques délicates qui me font les manier avec précaution.

Billie, c'est Billie Holiday, non, je ne vais pas faire sa bio, d'autres l'ont réussie magistralement et je vous conseille d'aller leur rendre visite.
Pourquoi j'aime Billie ? parce que lorsque j'ai appris plus d'elle, je me suis souvenue que le désespoir, c'est aussi ce qui s'entend et ce que très souvent, je capte, j'ai de bonnes antennes.
Ce n'est peut être pas la plus belle voix qui soit, ni la plus rauque, ni la plus nuancée, Billie n'était pas Ella, ni Sarah Vaughan.
Billie chantait parce que c'est probablement ce qu'elle savait faire de mieux, avec cette espèce de densité, de profondeur qui n'en a pas l'air, une tonalité pour sourds, aveugles, éclopés.

Billie née à Baltimore en 1915, confiée très tôt à des parents par sa mère partie chercher un travail à New-York, Billie violée dans la plus grande indifférence à 10 ans, Billie bonne à tout faire dans un bordel, Billie droguée, alcoolique, prostituée, Billie victime du racisme et Billie en prison souvent, tout ça, ça en fait de la voix à donner.
Je suis complètement bouleversée par la voix de Billie et c'est le mot juste, "upside-down", je suis médusée par ce qu'elle a entrepris de son auto-destruction, autant d'ardeur à la mutilation de soi, autant de rage déversée sur des graviers, autant de cris de rage, autant de petits grelots qu'elle continue d'agiter et dont l'écho continue de se répercuter bien après sa mort (1959).
Ecouter Billie, c'est réaliser qu'on est là comme des cons à penser qu'on est importantissimes, et qu'on occupe l'espace comme personne avant nous, alors qu'on pourrait bien se faire ratichonner les côtelettes dans moins de cinq minutes et que l'espace va ressembler à un grand désert aride sans Billie pour chanter.
Billie c'est ça !
Chanter parce que le désespoir n'admet aucune autre urgence.

Allez, un petit extrait ? Sinon, si vous le trouvez, essayer "april in Paris", c'est grand !

Et merci mille fois à




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