vendredi 10 octobre 2008

Gipsy's sad song

Extrait du journal Marianne du 09/12/2002, pas récent mais toujours actuel :

"Dans la bonne ville d'Avignon, dans le sud de la France, on prononce leur nom avec prudence: «Karaks». Comme en d'autres temps on disait «Bougnoules» pour les Arabes, «Ritals» pour les Italiens. Dans le patois vauclusien, cela signifie Tsiganes (Gitans, Manouches, Roms, Yéniches...). Ailleurs, on dit: «les gens du voyage», «les diseuses de bonne aventure» ou carrément «les voleurs de poules». Les craintes et les suspicions qu'inspirent ces individus en caravane, nourries souvent par des préjugés solidement ancrés, se sont érigées en tradition, ou presque. Ceux qui subissent cette humiliation sont affligés par la gêne qu'elle suscite: «Dans la rue, remarque Yvonne, Française d'origine gitane, les gens me regardent comme si je dégageais quelque chose de dangereux.» A Avignon, ces Tsiganes, qui sont installés en France depuis plusieurs siècles, sont confinés dans des zones périphériques, ghettoïsés dans des camps souvent à l'écart, loin des regards."
la suite ici

Depuis le début de l'été, j'ai changé de parcours pour me rendre à l'hosto et inversement. J'empruntais autrefois la nationale et parfois des chemins de traverse via Chateauneuf du Pape (je le fais l'automne, les vignes m'ensorcellent). Cette route m'était pénible, extrêmement fréquentée et je stressais terriblement. Je suis désormais la route de campagne via Roquemaure, Sauveterre, Villeneuve les Avignon et je débouche sur le Pont de l'Europe, seul point noir de la circulation le matin car très embouteillé. Mais la vue qui s'offre à l'automobiliste momentanément coincé dans une put*** de file qui n'avance pas, excuse tout ça de façon grandiose, le matin qui se lève sur le Rhône avec en grand plan le palais des papes, c'est cadeau !
Après quoi, je file autant que ma voiture me le permet par "la Courtine" et je prends le raccourci nommé "camp des gitans".
Depuis cet été, j'ai ainsi l'occasion de regarder d'un peu plus près les conditions de vie de ces gitans sédentarisés. Leur campement est à deux pas de l'hôpital. Je suis frappée par plusieurs choses, outre la saleté ambiante et les monceaux de déchets que je ne peux totalement leur imputer, il m'a été rapporté que les services de nettoiement et de déblaiement des ordures ne passent pas quotidiennement, outre la récupération massive de métaux divers et ferrailles alléchantes (je transforme assez facilementdans ma petite caboche et au jugé un bout de fer en collier voyez...)outre les gamins que je croise tous les jours, qui "devraient" être à l'école et qui sont à celle des buissons, je vois plein d'autres choses aussi dans ces bidonvilles de tôles ondulées. je vois des caravanes partout et aussi des ersatz de maisons "en dur" qui ne le sont naturellement pas, quelques murs de préfa, un toit de zinc ou à peu près, des fenêtres et des rideaux aux fenêtres. je vois des pots de fleurs, des petits massifs qui tentent de s'épanouir au milieu de cartons, emballages éventrés, je vois des cordes à linge sur lesquelles sèchent des vêtements, je vois une vie qui passe, un peu opaque, mais une vie qui voudrait somme toute ressembler à n'importe quelle autre vie de sédentaire.
On ne leur en donne pas les moyens.
Ce campement a une triste réputation, pourtant, beaucoup du personnel hospitalier utilise ce raccourci sans penser un seul instant si autant de circulation n'est pas de nature à troubler ce qu'ils essaient de créer. J'ai fait pareil jusqu'à ce matin où brusquement je me suis dit que j'étais comme les autres, seulement préoccupée de mon petit confort perso, ce matin, je ne pouvais pas discuter mais ce soir, je l'ai fait.
J'ai engagé la conversation avec un couple de gitans et je leur ai demandé s'ils n'en avaient pas marre de nous voir ainsi traverser leur camp plusieurs fois par jour. J'ai été accueillie par un grand sourire où peut être, mais je ne suis pas certaine, pointait comme une résignation. Ils ne m'ont pas dit qu'ils en avaient assez, ils m'ont dit que la route était à tout le monde.
La route oui, mais le reste ?
Je me suis sentie moche comme une vieille tique, je me suis demandé jusqu'où allait ma mauvaise conscience puisque mon sac à main était sur le siège passager et que j'avais pris grand
soin de fermer les portes.
Ainsi étais-je ce soir, debout à causer avec mon couple, et bien entendu, il n'a pas fallu longtemps pour que d'autres accourent, ainsi étais-je souriante et vaguement inquiète, ainsi me sentais-je terriblement moche en remontant en voiture, c'est quoi ce discours que je tiens ? alors que je ne suis pas foutue d'échapper aux clichés.
Pas bien fortiche hein ? J'ai un peu de mal à rester cohérente, et il ne manquerait plus que je parachève la culpabilité qui m'étreint en leur déposant un sac de pommes la prochaine fois, non, vraiment je suis très moche.
Et eux sourient...

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu n'es peut-être pas fichue d'échapper au cliché (je serais comme toi ...), mais au moins tu as eu la démarche d'aller vers eux.
Un petit pas qui compte beaucoup, non ?

Je danse sur un fil a dit…

Certes ma Leiloo, mais quand on a lu Alice Ferney, y'a vraiment de quoi se sentir minable...

Anonyme a dit…

Tu es "très méchante ou "très moche" ? Faut savoir LOL.

Tu es en colère contre toi bella ?

C'est peut-être que tu vois TOUT là où tu es, tout en haut, en équilibre sur ton fil ; nous, nous sommes de petites fourmis qui s'activent, travaillent, respirent, rouspètent, tentent tant bien que mal d'offrir quelque réconfort aux âmes en peine, bipèdes ou quadrupèdes -j'ai pas encore essayé de murmurer à l'oreille d'un mille pattes-.

Je ne sais plus où je voulais en venir (?)

Oui : regardes-toi-nous avec indulgence.

Je te dis ça ce soir alors que j'ai le coeur en charpie, dans une rage sans nom. Le refuge dont je viens de parler sur le blog a été victime d'un fou furieux ce week qui a tiré sur les chats à bout portant ; 7 chats sont tombés sous les balles ; une cinquantaine a disparu, Dieu sait où. Les rescapés vont être mis à l'abri ; où ? jusqu'à quand ?

Joëlle... je ne sais pas comment dire car j'ose à peine imaginer sa douleur ; celle des chats qui ont dû être terrorisés, se sont enfuis, enfin nous espérons.

Et je suis là, impuissante, à des centaines de kms...

Je vais pêcher au plus profond de moi une petite once d'indulgence que je ne trouve pas.

Pourquoi tant de haine ?

O secours !

Rose

Anonyme a dit…

Eh oui les clichés, mais en attendant il y a tant de misère sur terre, pas seulement parmi les gitans. Pendant ce temps, les grands jonglent à coups de milliards d'euros et de dollars. Ils s'en sortiront toujours, les petits auront plus de soucis encore à se faire.
Bises et bonne soirée Lolo

Anonyme a dit…

Je viens de voir le com de Rose. Cela confirme ce que je pense, l'humanité est inutile sur la planète!!

Je danse sur un fil a dit…

Mais qu'est ce que c'est que cette horreur ma Rose ?
A-t-on une identité du tueur fou ?
Que puis-je faire d'efficace là où je suis ?
Mais c'est quoi ce monde qui n'en finit pas de perdre la boule ? C'est quoi cette violence qui s'exacerbe et qui tue les plus démuniS ?
Vomir tout de suite et lutter encore.
Je suis là si tu as besoin de moi, je fais tout ce que tu me diras pour aider.

Diane a dit…

ERKKKKKKK Rose le malheur affreux, Oui Alain Pain d'èp. ça sert a quoi l'humanité?

Bon l'horreur.

Lolo les gitans sont traités comme nos amérindiens ici merde c'est révoltant. On fait ce qu'on peut et oui on tombe parfois dans des clichés grotesques mais c'est humain, c'est juste humain....